"L'intégrité du Liban, sa stabilité, reste une priorité pour Paris", confie à Xinhua l'expert fran？ais Frédéric Charillon, alors que le Premier ministre libanais démissionnaire Saad Hariri est rentré ce mercredi dans son pays dans un contexte de crise politique qui a débuté il y a près de deux semaines avec l'annonce surprise de sa démission depuis Riyad.

　　Il a été accueilli à Paris par le président Emmanuel Macron le 18 novembre pour un séjour de trois jours, per？u par plusieurs observateurs comme une sortie de crise. Une implication fran？aise qui n'est pas nouvelle, comme l'a rappelé le professeur de science politique à Science-Po, l'ENA ou encore l'Université d'Auvergne.

　　"La France a toujours été très impliquée dans le dossier libanais, ce pays francophone qu'elle conna？t bien et où elle compte de nombreux amis -également des adversaires-, de nombreux binationaux", rappelle M. Charillon.

　　Elle "s'est beaucoup impliquée en 1996 lors des bombardements israéliens de Cana, en 2006 lors de la guerre entre Isra？l et le Hezbollah, en 2007 lors de la crise institutionnelle, ensuite pour la reconstruction du Liban", précise-t-il.

　　Interrogé sur les enjeux pour la France de la crise politique actuelle du Liban, Frédéric Charillon explique qu'elle "ne peut accepter une déstabilisation du Liban par des puissances étrangères".

　　Le Liban est un "baromètre important des équilibres et des tensions de la région" car "c'est le théatre où s'affrontent des puissances extérieures (Iran, Arabie saoudite, Syrie, Isra？l ...) et si le Liban explose, c'est la guerre régionale qui menace. Donc c'est la stabilité de la Méditerranée qui est en cause. L'Europe sera forcément touchée. Cela préoccupe forcément la France", indique-t-il.

　　Alors que certains disent que la France a connu une sorte de "sommeil diplomatique" au Moyen-Orient depuis une dizaine d'années, Frédéric Charillon dit ne pas partager cette analyse.

　　"La stratégie fran？aise, dans les dernières années, a suscité beaucoup de questions dans une région qui a parfois eu du mal à comprendre la stratégie de Paris. Entre interventionnisme militaire (en Syrie, après la Libye) et crispations sur les sujets religieux, lutte antiterroriste, la France avait une activité forte, mais sa stratégie était moins claire", reconna？t-il.

　　"C'est ce à quoi Emmanuel Macron tente de remédier aujourd'hui. Pour la France comme pour d'autres, il sera difficile d'avoir une seule stratégie dans une région si plurielle", confie-t-il. Aussi, la stratégie du chef de l'Etat fran？ais consiste selon lui à "parler à tous les acteurs, ne pas se positionner en donneur de le？ons, mais ne rien céder sur les principes".

　　"Au Liban, on a vu cette stratégie à l'？uvre", relève l'expert fran？ais, ajoutant que "cela ne veut pas dire que tout est réglé" pour autant. "La France n'a pas les moyens de régler seule tous les problèmes du Moyen-Orient, mais elle a pu dénouer cet épisode libanais en faisant sortir Saad Hariri d'Arabie, sans antagoniser Riyad", souligne M. Charillon.

　　Il y a environ deux semaines, le fils de Rafic Hariri avait créé la surprise en annon？ant sa démission de son poste de chef du gouvernement depuis Riyad en Arabie saoudite. Il était ensuite venu à Paris à l'invitation de M. Macron. Depuis l'Elysée, Saad Hariri avait déclaré qu'il rentrerait ensuite au Liban, où le président libanais Michel Aoun a dit refuser d'accepter sa démission tant qu'elle ne lui serait pas remise en personne par l'intéressé. Les deux hommes doivent s'entretenir après la célébration de la Fête nationale ce mercredi.