Les femmes shui boivent ensemble après le rituel de sacrifice. (MA GENGPING)
Voyage à la découverte du Sud du Guizhou, une terre où de nombreuses ethnies minoritaires cohabitent en préservant leur culture traditionnelle.
LU RUCAI, membre de la rédaction
La préfecture autonome de Qiannan de la province du Guizhou, située dans le Sud-Ouest de la Chine, héberge plusieurs ethnies minoritaires, telles que les Buyei, les Miao, les Shui, les Yao, ainsi que des Han.
La première étape de notre visite est le district autonome shui de Sandu, dans le sud-est de la préfecture. C'est là que se tient la plus importante fête des Shui, le Duan.
Des traditions bien perpétuées
Les Shui, ethnie minoritaire en Chine, ne compte que 300 000 à 400 000 représentants. La plupart d'entre eux vivent dans le district de Sandu. Ils ont leur propre langue, une écriture bien à eux, ainsi qu'un calendrier et des fêtes particuliers. Ils ont su préserver leur us et coutumes traditionnels. Le Duan est la plus importante des six fêtes annuelles célébrant la maturation des céréales et le Nouvel An. D'ao?t à octobre, la fête se prolonge sur 49 jours : la fête la plus longue du monde ! Les célébrations comprennent des courses hippiques, des danses accompagnant des combats de taureaux, des danses avec tambours de cuivre et des danses de lusheng (orgue à bouche). On profite de la fête pour se rendre des visites entre parents et amis, on danse et on boit.
Cette année, la fête commen?ait le 20 septembre. Afin de promouvoir plus largement la culture shui et cette fête, le district de Sandu s'est chargé d'organiser une cérémonie d'ouverture grandiose. Les Shui des villages voisins, tous affublés de leurs vêtements de fête, doivent effectuer jusqu'à deux ou trois heures de marche pour arriver sur la place du site touristique Chandan de Gulu. Les villageois miao des environs sont eux aussi invités à donner des spectacles. Pan Zhui, une femme shui du village de Xiajie, m'a expliqué que la broderie à crin de cheval est un art traditionnel des Shui et une décoration importante des vêtements shui. Les femmes utilisent les longs crins de la queue de cheval et des fils de soie pour broder vêtements et chaussures. Les petites filles shui apprennent cet art folklorique dès leur enfance. Sa fille de 12 ans ma?trise déjà la broderie traditionnelle. Pan Zhui a mis un an à broder les vêtements et les chaussures qu'elle porte. Avec des amis à elle, elle nous a présenté la danse de toast ; sa parure brodée de fils d'argent scintille joliment au soleil. Elle m'a ensuite invitée à loger chez elle, m'offrant même de me broder une paire de chaussures. Malheureusement, je n'avais pas le temps d'aller lui rendre visite et j'ai d? décliner l'invitation, mais j'étais très émue par son hospitalité.
Les spectacles des troupes miao présentés le même jour m'ont autant éblouie. Les miao des environs se divisent en deux branches cousines dont les coutumes diffèrent un peu. Yang Tonglan, 21 ans, est enseignante dans une école maternelle de village. Alors qu'elle était encore étudiante, elle s'était chargée avec ses camarades de l'université de l'organisation de deux troupes de spectacle miao. Son rêve est de participer à la transmission de génération en génération de la culture et des m?urs miao. Des troupes de spectacle ont effectué la danse traditionnelle duoyuliang, une danse qui accompagne normalement les travaux agricoles et exprime le culte de la lune des Miao.
Le rite de sacrifice qui marque le début du Duan s'est tenu dans le parc national forestier du mont Yaoren. Les 18 patriarches des villages shui, représentants de l'ethnie, offrent des sacrifices aux ancêtres et aux dieux. Après ces rituels, les villageois et les invités s'assoient autour de tables dressées au bord de la rivière pour prendre le repas traditionnel et boire de l'alcool de riz. On entend retentir avec une belle régularité l'appel à xiuxiu (faire ? cul sec ? en shui). La célébration de Duan est pour les hommes l'occasion de boire à l'excès, tandis que leurs femmes à la vertueuse réputation doivent veiller leurs maris ivres jusqu'au réveil.
En 2006, cette fête de l'ethnie shui a été inscrite au patrimoine immatériel national. Grace à ce nouveau statut, la tradition sera mieux préservée et transmise. La forêt du mont Yaoren, bien que classée parc national, abrite plusieurs villages dont les habitants mènent une vie rustique. Le gouvernement local prévoit de déplacer ces communautés pour leur permettre d'accéder au confort moderne.